Face aux attaques de loup qui se succèdent en Haute-Marne et le traumatisme causé aux éleveurs, Nicolas Lacroix, président du Conseil départemental, a annoncé ce mardi 31 janvier un plan soutien à l’occasion d’une conférence de presse précédée de la visite de l’exploitation du Moulin, récemment touchée par une attaque. Témoignages et détails du plan.

Un plan inédit annoncé par Nicolas Lacroix

Aux côtés de Laurent Gouverneur, Brigitte Fischer-Patriat et Michel André, Nicolas Lacroix, président du Conseil départemental de la Haute-Marne, a annoncé une série de mesures pour aller « au-delà du soutien du monde agricole et du monde de la chasse ». Il parle de traumatismes de plus en plus fréquents chez les éleveurs et même si ce sujet agricole ne relève pas de la compétence directe du Département, il concerne toute la ruralité.

La première mesure prise est d’adresser un courrier à Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture, et Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique afin que l’ensemble de la Haute-Marne soit classée en Cercle 2, considérée donc comme zone à risque et que tous les éleveurs attaqués accèdent ainsi aux indemnisations de l’Etat.

La seconde mesure annoncée dans ce plan est une indemnité forfaitaire de 1 000 € pour toutes les exploitations qui auront subi une attaque. Elle servira à couvrir les frais engendrés, à s’équiper pour prévenir d’autres attaques et à compenser le manque à gagner des éleveurs. La condition pour accéder à cette indemnité sera que l’Office français de la biodiversité reconnaisse la présence d’un grand canidé.

Enfin, pour compléter les interpellations ministérielles et la mise en place d’une aide forfaitaire, le Conseil départemental entend aussi mettre en avant et soutenir la filière ovine en organisant notamment, du 3 au 7 avril 2023, une « Semaine de l’Agneau haut-marnais » au sein des collèges et des cantines scolaires.

Le Département au soutien des éleveurs ovins face au loup

Conférence de presse du 31 janvier : revivez les témoignages des acteurs présents

La conférence de presse du 31 janvier était l’occasion de réunir les acteurs agricoles pour qu’ils témoignent de leurs attentes et de leurs expériences quotidiennes sur la présence du loup en Haute-Marne.

Les attaques se multiplient dans les exploitations agricoles de Haute-Marne avec, selon Samuel Guenin pour la section ovine de la FDSEA, 65 brebis et 6 veaux tués depuis leur retour sur notre territoire.

Les dernières attaques en date se sont déroulées à Vouécourt, Hortes et Longchamps-les-Millières avec 13 animaux tués au total. A Vouécourt, sur l’exploitation du Moulin, Hugues Fischer évoque « trois bêtes perdues et une blessée ». Il ne cache pas sa colère et énumère les mesures prises pour éviter « le même massacre » : des filets électrifiés 30 cm plus hauts que les précédents fournis par la DDT, un parc pour enfermer la troupe de 160 brebis de 17 h à 8 h du matin et un chien de protection.

Effarouchement ou autres techniques

Hugues Fischer connaît les limites de ces techniques et, avec Thierry Lahaye, pour la FDSEA, ils demandent que l’Etat passe au stade supérieur. Thierry Lahaye insiste : « le loup est un prédateur et il a un rôle très relatif dans l’équilibre naturel du territoire, en termes cynégétiques. Poussé par la faim, il va au plus simple. Il s’est habitué à prélever dans les élevages. ».

Thierry Lahaye rapporte aussi le syndrome de « Surplus Killing » ou « Over Killing » qui consiste, non seulement, pour le loup, à prélever un mouton pour se nourrir mais à tuer pour tuer. Il souligne les conséquences dramatiques sur une troupe de brebis avec des taux d’avortements qui peuvent atteindre 70 %. « On ne prend pas assez en compte l’impact économique et affectif de ce genre d’attaques dans la gestion d’une exploitation ».

Samuel Guenin prévient aussi des conséquences de ces attaques sur la filière ovine. Les moutons disparaîtront et que deviendra la coopérative Cobevim installée sur le territoire ?  

Bon sens agronomique  

Pour Thierry Lahaye, la présence du loup contrarie, en plus, « le bon sens agronomique » mis en place par Hugues Fischer sur sa ferme. Il est passé en bio, a réintroduit de l’élevage pour la gestion des couverts végétaux et la fertilisation et « le loup apparaît comme un élément perturbateur ».

Steve Lahaye, président des Jeunes agriculteurs de Haute-Marne, craint que les loups aujourd’hui isolés ne constituent des meutes de 20 à 25 individus et que la situation ne s’aggrave. D’ailleurs, 24 JA sont inscrits au permis de chasse au cas où le droit de tirs est donné par la Préfecture.

Thomas Corvasce, président de la Fédération de chasse, apporte son soutien et va dans le même sens : « nous ne sommes pas en face de n’importe quelle espèce. La phase de colonisation est passée. On est au-delà et on peut craindre la constitution de meutes. Sans arrêt, nous franchissons des caps avec un manque de considération évident pour les acteurs ruraux ».